Gestion de crise

La population se retourne vers les autorités pour être rassurée

En situation de crise, lorsqu’il y a danger ou menaces, il est naturel que la population se retourne vers les autorités pour être rassurée. Ces dernières doivent alors informer la population et démontrer qu’elles sont en contrôle de la situation. Les médias sociaux ont aujourd’hui contribué créer un climat ou une personne se retrouve trop souvent accusée, jugée et pendue sur la place publique avant même d’avoir pu ouvrir la bouche. Plusieurs ont vu leur vie basculer dès cet instant. Dans d’autres cas, on a vu des vigiles pourchasser des délinquants allégués, et aller jusqu’à publier leur photo et leur adresse sur les poteaux dans les quartiers où ils habitaient et ce, avant même que la justice n’ait pu les déclarer coupables. Le tribunal de l’opinion publique ne doit pas se substituer aux tribunaux de droit commun qui sont eux organisés pour rendre justice.

Notre système judiciaire est axé sur la prémisse qu’après avoir payé sa dette à la société, une personne condamnée pourra y être réintégrée. Nos dirigeants ont un rôle à jouer pour que l’objectif soit atteint. Hélas, à défaut d’avoir bien joué leur rôle, on a par exemple vu des histoires où les autorités ont dû mettre la hache dans des projets de centres de transition dans la communauté pour d’ex-prisonniers parce que l’opinion publique, mal informée et peu rassurée, a eu le dessus sur les promoteurs du projet. L’argument du « pas dans ma cour » résonne très fort dans de telles circonstances et lorsque les autorités ne font pas bien leurs devoirs d’information et de communication à cet égard, il devient difficile de reprendre le contrôle de la situation lorsqu’elle nous a échappée.

Il arrive cependant des cas où la réinsertion sociale de condamnés est plus problématique et le Code Criminel y répond en leur collant l’étiquette de délinquant dangereux. La déclaration de délinquant dangereux vise à l’isoler de la population pendant une période indéterminée, afin de protéger le public des délinquants qui ont commis certaines infractions graves impliquant de la violence, principalement de nature sexuelle comme l’indiquent les statistiques et qui, de l’avis du tribunal, continuant de constituer une menace pour la société. 

À l’intérieur de ce groupe qui doit demeurer très restreint, les délinquants dangereux sont, par définition, considérés comme étant à risque plus élevé que d’autres délinquants. Mais l’étiquette de délinquant dangereux ne doit pas être attribuée systématiquement car le geste perd ainsi toute sa signification.

En outre, puisque le système judiciaire est géré par régions, le fait de réclamer le statut de délinquant dangereux pour des condamnés qui ne le méritent pas peut donner à penser qu’il y a une concentration plus importante de criminels dangereux dans certaines régions, alertant ainsi l’opinion publique et donnant aux citoyens l’impression qu’ils vivent dans un quartier ou une région où c’est plus dangereux qu’ailleurs. 

La crainte et la peur sont très mauvaises conseillères et lorsque la population est inquiète, c’est que quelqu’un, quelque part, a manqué à son devoir d’informer la population, de la rassurer et de démontrer qu’on est en contrôle de la situation. Qu’on a donc été, somme toute, un très mauvais gestionnaire de crise.